Miettes de sang de Claire Favan : Et si on lisait le début (2)

Miettes de sang de Claire Favan :

Et si on lisait le début

La suite …


Quand il ouvre les yeux, il fait si noir qu’il a peur d’être devenu aveugle. C’est possible avec le coup qu’il s’est pris sur la tête, non ?

Le silence est assourdissant.

Il ne sait pas où il est. Il sait juste qu’il s’est passé quelque chose de terrible. La boule d’angoisse logée au creux de son ventre le lui rappelle. Elle diffuse son flot d’appréhension dans ses veines. Son désarroi le fait trembler et ses dents claquent de façon incontrôlable.

– Papa ? Il y a quelqu’un ?

Une larme roule sur sa joue. Il n’ose pas bouger. Peu à peu, le néant face à lui devient simple obscurité et il croit discerner les limites de l’espace qu’il occupe.

Sa sœur profite souvent de l’absence de leurs parents et de son rôle de baby-sitter forcée pour lui montrer des films d’horreur. Elle adore l’entendre hurler quand il fait des cauchemars pendant des semaines après cela. Dans cette situation inédite et propice, son imagination s’emballe.

Une odeur humide et froide renforce son impression d’avoir été enterré vivant. Il geint de terreur.

Que s’est-il passé ? Pourquoi est-il là ? Pourquoi lui ?

Il essaie de bouger, mais ses mains sont attachées. Un bruit de chaîne qui racle le sol à chacun de ses mouvements l’affole.

Des larmes inondent ses yeux.

– Arrêtez, s’il vous plaît !

Il se met à geindre.

– Je veux mon papa !

Il fait mine de se lever, mais quelque chose retient sa cheville. Il est déséquilibré et chute lourdement. Il hurle de terreur et de douleur lorsqu’il s’écorche les paumes sur le sol brut.

Cette f ois-ci, il pleure sans retenue.

– Laissez-moi partir !

Et soudain, il réalise que tout ceci est impossible. Il connaît son ravisseur. C’est le père d’un de ses amis. Il doit rêver.

Il aimerait se réveiller, maintenant. Il se passe une main fébrile sur les joues. Est-ce qu’en dormant, on peut sentir le goût salé de ses larmes et celui, métallique, de son sang ? Il en doute.

Derrière la porte, il entend un bruit qu’il reconnaît sans mal. Des pas. Quelqu’un a dû l’entendre crier et s’approche.

Le gamin se recroqueville dans un coin. Son visage se prend dans une toile d’araignée. Des petites pattes velues galopent dans son cou, mais il n’y prend pas garde.

Quelqu’un enfonce une clef dans la serrure. Un clac sonore retentit dans le noir une seconde avant qu’une lumière poussiéreuse inonde le minuscule réduit où il est retenu prisonnier. Une ombre se découpe à contre-jour dans l’encadrement : la silhouette massive qu’il reconnaît tout de suite.

Il a passé tant de temps chez son ami. Tous ces étés occupés à jouer, tous ces jeux d’imagination, toutes ces pyjama parties, tous ces moments où cet homme ne lui a presque pas accordé d’attention. C’est comme s’il venait de retirer son masque de normalité.

Il a l’impression d’être une friandise que l’adulte aurait envie de dévorer. Et ce désir qu’il perçoit malgré son innocence le terrifie.

– Laissez-moi sortir, je vous en prie.

Un rire glaçant répond à sa supplique.

– Tu ne vas pas me croire, mais quelqu’un a passé un appel anonyme au département de police. Tu as été repéré près de la gare routière. Depuis quelques heures, tu es donc officiellement considéré comme un fugueur.

Il a l’air de se réjouir de la situation et cela terrorise le gamin bien plus que tout ce qu’il a vu jusqu’à présent. Il ose pourtant poser sa question tout en reniflant.

– Un fugueur ? Ça veut dire quoi ?

Son ravisseur hausse les épaules.

– Ça veut dire que tout le monde va te chercher dans la mauvaise direction.

Le gamin comprend que ce qui lui arrive a été préparé avec soin. Il est tombé dans un piège. Il ne fait que confirmer l’évidence.

– C’est vous qui avez passé cet appel ?

– Une idée de génie, hein ?

Sa main robuste frôle les cheveux du garçon qui recule pour échapper à son contact. L’homme hausse les épaules en signe de désapprobation avant de se justifier.

– Tes parents ne t’ont jamais dit de ne pas te promener seul en ville ? C’est dangereux, tu sais.

Ses doigts se font plus caressants.

– Ils auraient dû te prévenir. Cela leur aurait évité de perdre leur fils.

Il soulève l’enfant qui se débat mollement.

– Tu sais que ça ne sert à rien. Allonge-toi là, sans faire d’histoire.

 

Rhaaaaa, c’est rageant, on veut on savoir plus ! Et il va falloir attendre demain !

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