L’exquis cadavre exquis, épisode 58
Elle s’appelait Camille, avait la phobie de la chlorophylle et n’a rien trouvé de mieux que de se cacher dans une serre pour tenter d’échapper à son l’Assassin .
Les inspecteurs Lerot et Remini sont sur le coup mais de nombreuses questions restent encore inexpliquées
Pourquoi Max a-t-il été si troublé en apprenant la mort de Camille ? Qui envoyait à la victime de petits cercueils en bois ? Que sait la brigade financière sur cette mystérieuse affaire ?
Accrochez-vous, l’histoire se complique ! Camille a-t-elle été assassinée parce qu’elle enquêtait sur un vaste scandale pharmaceutique, avec Klatschmohn Aktion ? Ou bien à cause d’un détournement de fonds lié au Museum ? A moins qu’elle n’ait découvert l’escroquerie vinicole de son beau-père. Et si sa disparition était liée à celle de sa soeur jumelle ? La dépression de sa mère explique-t-elle son silence ? Quant à Costes, le privé à la réputation sulfureuse, quel rôle a-t-il joué dans l’histoire ?
Maintenant la suite c’est vous qui l’inventez !
L’exquis cadavre exquis
Episode 58
by Jean-Paul dos Santos Guerreiro
In extremis
Dès son incorporation dans la brigade, Lebel sentit une tension constante au sein de l’équipe. Trop de meurtres, trop de questions, pas assez de réponses… La pression de leurs supérieurs devenait ingérable. Et puis, pourquoi dès son arrivée, Norek, l’avait-il pris littéralement en grippe, malgré tous ses efforts ? Il était toujours sur son dos à essayer de le piéger!
Pourtant, s’il y en avait bien un qu’il admirait, c’était Norek.
Que serait-il devenu sans lui ?
Un voyou, un dealer peut-être ?
Pire, sûrement !
A 15 ans, Lebel en était à son troisième braquage quand il s’était retrouvé face à ce policier qui après l’avoir appréhendé, était venu le voir plusieurs fois en détention. A l’époque, il avait le crâne rasé, chétif, à peine cinquante kilos, pour un mètre soixante-dix-sept. Il avait repris ses études pour celui qui était devenu « sa référence ». Quand il s’inscrit à l’école de police, il avait fait son possible pour être dans la même brigade que Norek, celui qui lui avait redonné un motif de vivre et une vraie envie d’aider son prochain.
Quelle fut sa surprise en arrivant ! Cheveux grisonnant et l’air bougon, Norek l’avait tout de suite pris de haut. Lebel n’avait même pas osé lui dire qui il était et pourquoi il était là… Tous les jours, il voyait Norek s’enfoncer dans un monde gris et taciturne. Ses doigts complètement jaunis par la nicotine à force d’enchaîner les cigarettes. Plus que des envies, c’était devenu un véritable besoin. Il les allumait nerveusement, en plus des cafés qu’il buvait à toutes heures de la journée, et qui ne lui étaient plus d’aucune utilité, juste un reflex.
Ce matin, il décida de faire à son tour quelque chose pour lui. L’envie de le mettre au pied du mur, de lui demander ce qui lui était arrivé. Il appela Norek pour qu’il vienne à Lariboisière. Il était en bas du poste de Police, et le vit arriver quelques minutes plus tard… S’attendant à le voir tourner sur sa droite, Norek filait tout droit, dans la direction opposée. Pourquoi ? Lebel décida de le suivre. Il eut à ce moment là, une drôle d’intuition.
*****
Cela faisait quelques minutes que Norek stationnait au pied d’un immeuble, une cigarette à la main, une bière dans l’autre. Lebel n’osait l’aborder. Soudain, il jeta sa cigarette à peine entamée dehors et la bière sur le siège passager, démarrant en trombe suivant un scooter qui filait déjà à toute vitesse. Lebel démarra à son tour. Norek roulait comme un fou atteignant des vitesses dangereuses, évitant de justesse une jeune maman et sa fille avec une trottinette, grillant les feux et les stops. Sa chance l’abandonna quand un gros 4×4 blanc le percuta de plein fouet.
Il s’arrêta frein à main à fond en dérapa. Il sortit de son véhicule téléphone à la main appelant les urgences en leur signalant le lieu de l’accident. Les occupants de la BMW étaient sonnés mais indemnes, les airbags avaient rempli leur fonction.
L’état du véhicule obligea Lebel à passer par la portière du passager pour voir l’état du blessé.
Pas fameux. Il ne ressentait aucun pouls, ni respiration. Lebel tenta une réanimation pendant plusieurs minutes avant l’arrivée des urgences. Norek se reveilla enfin, en hurlant… Ses jambes avaient l’air complètement broyées suite à la déformation de la portière, coincées par la boite de vitesse.
– Putain ! Mes jambes… Ça fait un mal de chien.
– Ne bouge pas, Norek ! Les secours arrivent !
– Ne bouge pas… Tu te fous de ma gueule ? Où veux-tu que j’aille dans cet état ? Et qu’est-ce que tu fous là, Lebel ? Tu devais pas aller à Lariboisière ?
– Il fallait que je te parle. Savoir ce qui t’étais arrivé, pourquoi tu as tant changé. Tu n’es plus le Norek de mes souvenirs.…
– Le Norek de tes souvenirs.… C’est quoi cette connerie encore ?
– Mon nom n’est pas Lebel. Je m’appelle Jacques. Jacques Saussey !
– Mais…
– Non, ne dis rien ! Laisse-moi finir. J’ai voulu suivre ton exemple Norek, rentrer dans la police mais avec mon casier, j’ai du me refaire une identité. Je ne t’ai pas dit non plus qui j’étais car ma vie, ma rédemption repose sur un faux, sur un mensonge. Je ne voulais pas t’y impliquer.
– Jacques ? L’ado paumé ?
– Oui !
– Oh, Jacques !… Oh, putain !… J’crois bien que tu viens d’me sauver la vie, gamin ! dit-il en s’évanouissant de nouveau, pendant que l’auto-radio s’arrêta sur un morceau de « In Extremo ».
Au loin, on entendait déjà les sirènes hurlantes des secours…