PREMIÈRES LIGNE #126 : Une dernier ballon pour la route, Benjamin Dierstein

PREMIÈRES LIGNE #126

Bonjour, ravie de vous retrouver pour un nouveau rendez-vous du dimanche : premières lignes, créé par Ma Lecturothèque.

Le concept est très simple, chaque dimanche, il faut choisir un livre et en citer les premières lignes.

Je poursuis aujourd’hui avec vous ce nouveau rendez-vous hebdomadaire !

Et merci à Aurélia pour ce challenge.

Le livre en cause

Un dernier ballon pour la route, Benjamin Dierstein

La première chose que j’ai vue en sortant de la voiture, c’est deux gosses tout sales qui jouaient avec une vieille pelle rouillée et un cadavre de chien. J’avais à peine foutu les pieds dehors qu’ils me lançaient déjà des cailloux en me traitant de fils de pute. Le plus grand des deux faisait un bon mètre quarante de long comme de large, et le plus petit avait les dents si pourries qu’on aurait dit qu’il avait passé la nuit à grignoter une tronçonneuse. Ils avaient à peine dix ans et la peau déjà burinée par le soleil, les eaux stagnantes et la pollution, comme tous ces gamins de hippies que j’avais côtoyés quand j’avais leur âge. 

La deuxième chose que j’ai vue en m’avançant vers eux, c’est les trois pitbulls attachés à une carcasse de 205, déchaînés comme une mer de tempête force douze, et qui aboyaient à l’unisson en me faisant comprendre que j’allais passer un sale quart d’heure si jamais les mioches s’amusaient à défaire le nœud de leurs laisses. 13 Je me suis approché d’eux en brandissant ma vieille matraque de collection, et les chiards ont détalé dans la maison en moins de deux dès qu’ils ont vu le gourdin. Je les ai suivis lentement, en faisant attention à ne pas foutre mes panards dans un piège à ours ou une boîte de conserve gangrenée. La cour de la ferme tenait plus de la déchetterie que du jardin à la française, parsemée de caravanes à l’abandon, de pneus usés, de sacs d’ordures et de cadavres de bières à n’en plus finir. La bâtisse qui courait le long de cette décharge était une vieille longère décrépite, occupée selon les gens du coin par une communauté de zonards que la ville avait relogés ici, faute de savoir quoi en foutre. Personne dans la région ne voulait de cette bande d’apaches, qui selon les voisins passaient leur temps à picoler, à se chicaner et à se mettre sur la gueule dès qu’ils avaient un peu trop forcé sur la Valstar. Tous les agriculteurs du coin avaient quitté le pays bien avant qu’ils arrivent, forcés de revendre leurs champs aux grandes enseignes qui pullulaient tout autour. D’où j’étais, je pouvais sentir les effluves des poubelles du McDo le plus proche, cette étrange combinaison de produits toxiques et de steaks périmés que les jeunes d’aujourd’hui considèrent comme une odeur appétissante.

Les deux gosses étaient à peine rentrés que quatre loubards avec des gueules impossibles et une bonne femme en haillons sont sortis de la maison. Ils avaient l’expression abrupte de ces gens de la campagne faméliques, le regard pincé à force de plisser les yeux. Malgré les années, j’ai reconnu Jérôme Hinault en moins de deux : cheveux rasés sur les côtés, bras bardés de tatouages, pipe à opium au coin du bec. Il avait les mêmes traits qu’à l’époque, rendus encore plus 14 grossiers par l’alcool, comme s’il était devenu une sorte de caricature de lui-même. Le type qui se tenait derrière lui avait un fusil à la main et la mâchoire qui pendouillait.

 – Keski veut, l’môssieur ?

Il faisait chaud et, tout en recrachant la fumée de ma Gitane dans l’air lourd et immobile, j’ai cherché au fond de leurs yeux une trace d’empathie, mais je n’y ai croisé rien d’autre que l’abîme.

– Je cherche une fillette et sa maman.

– N’y a pas d’fillette ici.

– J’peux vous montrer une photo ?

– N’y a pas d’fillette ici, qu’on vous dit. Pourquoi qui vient nous emmerder, l’môssieur ?

 Au moment où j’ai plongé la main dans ma veste pour sortir le cliché de Romane et Marilou, le type au fusil a pointé son arme dans ma direction. Je me suis avancé malgré tout vers Hinault en espérant qu’il me reconnaîtrait, mais en voyant ses yeux brillants comme un feu qui meurt, j’ai su que ça ne serait pas le cas.

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Première ligne # 125 : Avec la permission de Gandhi de Abir Mukherjee

PREMIÈRES LIGNE #125

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Le livre en cause

Avec la permission de Gandhi de Abir Mukherjee

21 décembre 1921
1

Un cadavre dans un funérarium n’a rien d’inhabituel. Il est rare en revanche d’en voir un y entrer par ses propres moyens. Cette énigme mérite d’être savourée, mais le temps me manque, attendu que je suis en train de courir pour sauver ma peau.

Un coup de feu retentit et une balle passe près de moi sans rien atteindre de plus menaçant que du linge qui sèche sur un toit. Mes poursuivants – des collègues de la Force de Police impériale – tirent à l’aveugle dans la nuit. Cela ne veut pas dire qu’ils ne pourraient pas avoir plus de chance avec leur prochaine rafale, et même si je n’ai pas peur de la mort, atteint d’une balle dans le dos en tentant de s’enfuir n’est pas exactement l’épitaphe que je souhaite sur ma tombe.

Alors je cours, embrumé d’opium, sur les toits de Chinatown endormi, je glisse sur les tuiles disjointes qui vont s’écraser sur le sol et je me hisse d’un toit à l’autre avant de me réfugier enfin dans un espace minuscule sous le rebord d’un mur bas entre deux bâtiments.

Les policiers se rapprochent et j’essaie de calmer ma respiration tandis qu’ils s’interpellent dans l’obscurité qui avale leurs voix. Ils se sont apparemment séparés et sont peut-être à une certaine distance l’un de l’autre. Tant mieux. Ils avancent donc sans plus de repères que moi, et pour le moment le mieux que j’ai à faire est de rester immobile et silencieux.

Ma capture mènerait à des questions plutôt embarrassantes auxquelles je préfère ne pas devoir répondre sur ce que je faisais à Tangra au milieu de la nuit, puant l’opium et couvert du sang de quelqu’un d’autre. Reste aussi la question secondaire de la lame en forme de faucille que je tiens à la main. Sa présence serait aussi difficile à expliquer.

Ma sueur et le sang se sont évaporés et je frissonne. Décembre est froid, du moins selon les critères de Calcutta.

Des bribes de conversation me parviennent. On dirait que le cœur n’y est pas. Je ne peux pas le reprocher aux policiers. Ils ont autant de chances de dégringoler d’un toit que de trébucher contre moi ; et compte tenu des événements de ces derniers mois je doute que leur moral soit au beau fixe. À quoi bon risquer de se casser le cou en poursuivant des

ombres si personne ne doit les en remercier ? Je veux qu’ils fassent demi-tour, mais ils s’obstinent à frapper dans le noir avec la crosse de leur fusil ou leur lathi1 comme des aveugles qui traversent une rue.

La présence rythmique se rapproche. J’envisage les choix se présentent, du moins je le ferais s’il en existait un. Fuir est hors de question – le type est armé et paraît si proche à présent que même dans le noir il n’aurait guère de difficulté à me tirer dessus. Me battre contre lui est voué à l’échec. J’ai la lame, mais je peux difficilement m’en servir contre un collègue, et de toute façon, avec trois autres policiers à proximité, mes chances de les éviter se ratatinent plus vite qu’un coquelicot au crépuscule.

Le son des coups change et le mince béton au-dessus de ma tête sonne creux. L’homme doit se trouver directement au-dessus de moi. Il remarque lui aussi le changement de son et s’arrête. Il frappe le rebord avec son fusil et saute à terre. Je ferme les yeux en attente de l’inévitable, mais une voix s’élève. Une voix que je reconnais.

« C’est bon, les gars. Ça suffit. On rentre. »

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PREMIÈRES LIGNE #124 : Le crépuscule des éléphant, Guillaume Ramezi

PREMIÈRES LIGNE #124

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Le livre en cause

Le crépuscule des éléphants, Guillaume Ramezi

À tous ceux qui se battent au quotidien
pour changer les choses.

Quand l’éléphant trébuche,
ce sont les fourmis qui en pâtissent

Proverbe africain

PROLOGUE

Esmond Martin n’avait pas bu une goutte depuis des années. Ce soir-là, lorsqu’il rentra à la nuit tombée dans sa modeste demeure des faubourgs de Libreville, il jeta sa sacoche tachée de sang au pied du porte-manteau et, sans même prendre la peine de se laver les mains, sortit l’antique bouteille de Glenmorangie vingt ans d’âge qui croupissait dans le buffet. Il s’en servit une grande rasade et vida le verre d’un seul trait. Le liquide épais et tiède, réchauffé par la moiteur de l’été gabonais, lui brûla à peine la gorge, réveillant vaguement de vieux démons enfouis depuis qu’il s’était épris de ce pays et de ses merveilles. D’une certaine façon, ces dernières avaient été sa bouée de sauvetage, alors il investissait toute son énergie pour les défendre depuis vingt ans. Aujourd’hui pourtant, il avait l’impression que toutes ces années avaient été vaines. Vingt ans qu’il écumait les forêts pour localiser les troupeaux. Vingt ans qu’il fréquentait à longueur d’année les écoles, de la capitale jusqu’aux plus petits villages, pour leur apprendre, leur prouver qu’ils devaient protéger leur faune. Vingt ans qu’il soutenait les ONG désireuses d’informer le grand public occidental. Vingt ans qu’il frappait aux portes des gouvernements successifs pour les convaincre qu’ils auraient plus à gagner, à long terme, dans le développement d’un véritable écotourisme que dans la déforestation massive.

En fin d’après-midi, quand Bonaventure l’avait appelé, c’est un ranger en pleurs qui lui avait demandé de venir le rejoindre. Esmond Martin avait sauté dans sa Jeep et s’était précipité à sa rencontre. Il avait eu l’occasion de voir des horreurs depuis tout ce temps, mais ce qu’il avait découvert en arrivant dépassait l’entendement. Il en avait compté trente-quatre au total. Trente-quatre cadavres à qui il ne manquait que les défenses. Trente-quatre éléphants massacrés pour leur ivoire. Parmi eux, il y avait même des éléphanteaux. Certains si jeunes que le précieux matériau devait à peine poindre au coin de leurs bouches. Ils avaient été exterminés quand même, juste pour le plaisir sans doute. Au moins, les fois précédentes, avaient-ils laissé la vie sauve à ceux ne présentant aucun intérêt et les rangers avaient pu les récupérer pour les confier à la réserve. C’était le quatrième carnage en un mois et cette fois, l’ampleur était phénoménale. Ils étaient face à une attaque d’envergure.

Les brigades d’intervention avaient bien repéré quelques groupes de braconniers qui avaient franchi la frontière récemment, mais sans jamais parvenir à les prendre sur le fait. Sur le chemin du retour, après plusieurs coups de téléphone désespérés, Esmond avait réussi à obtenir un rendez-vous avec le Premier ministre pour le lendemain matin. Il devait absolument le convaincre de déployer l’armée autour des zones d’habitations principales des derniers troupeaux d’éléphants présents dans la région.

Un bruit dans la ruelle à l’arrière de la maison le sortit de ses réflexions. Il tendit l’oreille. Après quelques secondes pendant lesquelles il ne perçut rien de plus, il reporta son attention sur son verre et se resservit. Il n’entendit pas la porte de la cuisine s’ouvrir et, lorsque la machette s’abattit sur sa nuque, il n’eut pas le temps de réagir. Il était déjà trop tard. Une poignée d’autres coups précis et haineux plut sur son crâne et le haut de son corps, le privant même d’une dernière pensée pour ses protégés.

En à peine deux minutes, Esmond Martin, l’ultime rempart préservant les éléphants gabonais de la barbarie venait de céder.

Le crépuscule des éléphants
Au Gabon, le danger est omniprésent. Des meurtres atroces ont été commis… Andreas ne se fie pas aux autorités locales corrompues jusqu’à la moelle.
Lorsque Camille, capitaine de police à Paris, reçoit son appel de détresse, elle n’hésite pas à se mettre en danger pour le rejoindre. La jeune femme va se retrouver au coeur d’un trafic d’ivoire international qui ne laisse aucune chance aux éléphants et leurs défenseurs.
À qui profite réellement ce commerce ? Qui en tire les ficelles ? À qui peut-on réellement se fier ?
Guillaume Ramezi met en lumière un commerce illégal et pourtant toujours d’actualité dans un thriller à la fois angoissant et touchant.

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PREMIÈRES LIGNE #123, Oskal de Guillaume Coquery

PREMIÈRES LIGNE #123

Bonjour, ravie de vous retrouver pour un nouveau rendez-vous du dimanche : premières lignes, créé par Ma Lecturothèque.

Le concept est très simple, chaque dimanche, il faut choisir un livre et en citer les premières lignes.

Je poursuis aujourd’hui avec vous ce nouveau rendez-vous hebdomadaire !

Et merci à Aurélia pour ce challenge.

Le livre en cause

Oskal de Guillaume Coquery

PROLOGUE

Besançon 2010

Le commandant Jarier inspira. Il devait se calmer, retrouver le contrôle et composer son numéro. Il allait encore se prendre une réflexion cinglante, c’était certain.

– Allo ! Monsieur le préfet, c’est Jarier.

L’homme ne répondit pas de suite, il l’entendit soupirer, et ce n’était pas de l’admiration.

– Oui qu’y a-t-il ? Je vous ai dit de ne pas m’appeler, vous êtes con ou quoi ?

Le commandant se mit à bredouiller, c’était la première fois que le préfet Bergeron le traitait de con ! Imbécile, idiot, abruti, ça, il y avait eu droit, mais con, c’était inédit !

Le policier esquissa un sourire. Ce qu’il avait à lui dire était de nature à ébranler cet homme charismatique. Il allait se le prendre dans la gueule… Il savoura l’instant.

– Nous avons un problème.

Il s’en voulut immédiatement. Ce n’était pas la phrase qu’il avait préparée ! Il se mordit la lèvre. Il aurait dû lui dire : « VOUS avez un problème », mais, envahi par son mauvais stress, ce n’était pas ce qui était sorti ! Il apprécia tout de même l’effet. La réponse cinglante, habituelle, ne vint pas. Il avait marqué un tout petit point. Ce serait sa victoire temporaire, minuscule certes, mais face à lui, il savait se contenter de peu.

– Je vous écoute Commandant.

Ah ! Il lui donnait du commandant, maintenant !

Le haut fonctionnaire n’était pas né de la dernière pluie, si le flic lui téléphonait, ce n’était pas pour rien. S’il entamait la conversation, en lui disant que lui, préfet de la République, avait un problème commun avec cet idiot, c’est qu’il y avait bien quelque chose. Il serait désagréable un peu plus tard, voilà tout.

– La joggeuse qui a disparu il y a deux semaines, Séverine Bonaud…

Le commandant Jarier marqua une pause, pensant être interrompu, il n’attendit pas trop longtemps. Il ne fallait pas lui laisser trop d’ouvertures. 

– Comme vous le savez sans doute, on a trouvé une trace de sang sur un arbre, à l’endroit où elle est montée dans le 4×4.

– Non, je l’ignorais. C’est le parquet qui suit ce genre d’affaires, je ne m’intéresse pas à ces histoires.

– Vous devriez, monsieur le préfet, L’ADN a été décodé, j’ai reçu cet après-midi les résultats, il s’agit d’un homme. Il est inconnu du FNAEG.1

– Et alors, en quoi cela me concerne ?

– Le technicien qui a traité le dossier m’a appelé, il y a une correspondance partielle, avec un ADN du fichier central.

– Ce qui signifie ? Arrêtez avec vos devinettes, je n’ai pas le temps.

– Il s’agit d’un lien direct, fils, frère ou père.

– Cela veut dire que vous avez décelé une relation avec un individu déjà fiché ?

– Oui, c’est bien cela, mais le technicien n’a pas le niveau de sécurité suffisant pour entrer dans la base.

– Et donc ?

PROLOGUE

Besançon 2010

Le commandant Jarier inspira. Il devait se calmer, retrouver le contrôle et composer son numéro. Il allait encore se prendre une réflexion cinglante, c’était certain.

– Allo ! Monsieur le préfet, c’est Jarier.

L’homme ne répondit pas de suite, il l’entendit soupirer, et ce n’était pas de l’admiration.

– Oui qu’y a-t-il ? Je vous ai dit de ne pas m’appeler, vous êtes con ou quoi ?

Le commandant se mit à bredouiller, c’était la première fois que le préfet Bergeron le traitait de con ! Imbécile, idiot, abruti, ça, il y avait eu droit, mais con, c’était inédit !

Le policier esquissa un sourire. Ce qu’il avait à lui dire était de nature à ébranler cet homme charismatique. Il allait se le prendre dans la gueule… Il savoura l’instant.

– Nous avons un problème.

Il s’en voulut immédiatement. Ce n’était pas la phrase qu’il avait préparée ! Il se mordit la lèvre. Il aurait dû lui dire : « VOUS avez un problème », mais, envahi par son mauvais stress, ce n’était pas ce qui était sorti ! Il apprécia tout de même l’effet. La réponse cinglante, habituelle, ne vint pas. Il avait marqué un tout petit point. Ce serait sa victoire temporaire, minuscule certes, mais face à lui, il savait se contenter de peu.

– Je vous écoute Commandant.

Ah ! Il lui donnait du commandant, maintenant !

Le haut fonctionnaire n’était pas né de la dernière pluie, si le flic lui téléphonait, ce n’était pas pour rien. S’il entamait la conversation, en lui disant que lui, préfet de la République, avait un problème commun avec cet idiot, c’est qu’il y avait bien quelque chose. Il serait désagréable un peu plus tard, voilà tout.

– La joggeuse qui a disparu il y a deux semaines, Séverine Bonaud…

Le commandant Jarier marqua une pause, pensant être interrompu, il n’attendit pas trop longtemps. Il ne fallait pas lui laisser trop d’ouvertures. 

– Comme vous le savez sans doute, on a trouvé une trace de sang sur un arbre, à l’endroit où elle est montée dans le 4×4.

– Non, je l’ignorais. C’est le parquet qui suit ce genre d’affaires, je ne m’intéresse pas à ces histoires.

– Vous devriez, monsieur le préfet, L’ADN a été décodé, j’ai reçu cet après-midi les résultats, il s’agit d’un homme. Il est inconnu du FNAEG.1

– Et alors, en quoi cela me concerne ?

– Le technicien qui a traité le dossier m’a appelé, il y a une correspondance partielle, avec un ADN du fichier central.

– Ce qui signifie ? Arrêtez avec vos devinettes, je n’ai pas le temps.

– Il s’agit d’un lien direct, fils, frère ou père.

– Cela veut dire que vous avez décelé une relation avec un individu déjà fiché ?

– Oui, c’est bien cela, mais le technicien n’a pas le niveau de sécurité suffisant pour entrer dans la base.

– Et donc ?

– Moi non plus, je n’ai pas l’accréditation. J’ai dû demander au commissaire divisionnaire Karpof, c’est lui qui m’a dit de vous appeler pour que vous soyez au courant.

– Où est le problème, bon sang ?

– Vous vous souvenez, lorsque les colis piégés étaient arrivés à la préfecture ? On avait prélevé l’ADN de tout le personnel préfectoral, pour pouvoir isoler l’empreinte génétique du terroriste ? C’est dans ce fichier que l’on a trouvé une correspondance.

– Vous voulez dire que l’auteur de l’enlèvement de cette bonne femme est parent avec un de mes employés ?

– C’est tout à fait ça, monsieur le préfet.

– Qui donc ?

– Euh, c’est un peu embarrassant, comme ça…

– Dépêchez-vous de balancer le morceau, triple idiot.

– Vous ! Monsieur le préfet.

L’homme ne dit rien. Jarier n’osait intervenir… Au bout d’un long moment, le haut fonctionnaire reprit la parole. Toute animosité avait disparu. Il se recentra sur l’essentiel, le seul sujet digne d’intérêt… lui !

– Écoutez-moi bien, Jarier, je n’ai plus que mon fils, et je suis sûr… non, je suis certain qu’il n’est pour rien dans cette affaire. Vous allez vous débrouiller comme vous voulez, mais vous me faites supprimer de votre foutu fichier. Je n’y suis pas et je n’y ai jamais été… Me suis-je bien fait comprendre ? 

– Mais, je ne sais pas si l’on peut le fai…

– Taisez-vous ! Je vous ai dit de trouver une solution. Vous dégotez un hacker, surtout choisissez en un bon, et tout est possible. Au besoin, faites vous aider par Karpof ! Ce n’est que de l’informatique, on peut tout faire. Les seuls freins sont le temps et l’argent, il se trouve que j’ai les deux. Vous m’avez compris ? Je ne suis pas… dans… ce… fi… chier !

 Martela-t-il, en détachant chaque syllabe, assénée comme autant de coups de masse dans le cortex de son subordonné. Avant que le flic n’ait eu le loisir d’ajouter quoi que ce soit, le préfet avait raccroché.

OSKAL
Été 2010, dans un bois proche de Besançon, une joggeuse disparaît. Elle ne sera jamais retrouvée et, étrangement, l’affaire sera vite classée.
2018, à proximité de Toulouse, une danseuse de cirque est découverte morte.
Pour le jeune capitaine Damien Sergent et ses coéquipiers, cette affaire a toutes les apparences d’un suicide… jusqu’à ce que certains éléments les conduisent à Besançon.
Sur place, certaines personnes ont tout intérêt à ce que le passé ne soit pas déterré…
Entre manipulation, influence et souvenirs douloureux, l’équipe de Damien Sergent évolue désormais en terrain hostile.

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